Mentor, Coach, Tuteur, Formateur : quelles différences ?

Peut-on être indifféremment mentor, coach, tuteur ou formateur, selon le contexte ou le programme dans lequel on s’insère ? Ces termes sont-ils équivalents ou recouvrent-ils un champ différent d’expériences et de type d’accompagnement ?

 

A qui faire appel dans quelle situation, et selon quels critères ?

S’il y a un intérêt à creuser ces différences, ce n’est bien évidemment pas pour la querelle sémantique mais pour savoir quel type d’accompagnement mettre en place dans quelle situation. Or on constate à l’usage et en échangeant avec les acteurs eux-mêmes de ces dispositifs que la confusion est souvent grande, certains utilisant le terme de « mentor » ou de « coach » de manière très large, indifférenciée, dans des cadres très variés.

De nombreux programmes ne donnant pas, à l’évaluation, de résultats probants, au-delà de la satisfaction des uns et des autres d’y avoir participé et accolé leur nom ou logo, on peut supposer que cela est dû en partie à la confusion des missions et objectifs qui y préside.

Mon expérience personnelle m’a amené à vivre et à pratiquer plusieurs de ces rôles : j’ai été mentor à plusieurs reprises, j’ai piloté un programme international structuré de mentorat, j’ai collaboré de près avec des coachs, j’ai enseigné et formé des ados et des adultes, dans un cadre scolaire ou professionnel… sans oublier les quelques cours particuliers donnés en tant qu’étudiante à de plus jeunes élèves.

S’il n’est pas évident de poser des frontières clairement délimitées entre certains de ses rôles, tant ils peuvent se chevaucher sur certaines dimensions, la pratique fait apparaître néanmoins un certain nombre de critères intéressants à creuser. Croisés, ils peuvent permettre de construire des dispositifs très précis dans l’accompagnement souhaité.

 

Quels critères de distinction entre ces différents rôles ?

A l’expérience, les critères suivants me sont apparus comme pertinents et intéressants à évaluer en amont de la mise en place d’un programme d’accompagnement :

  • Le profil de l’accompagnant : diplômes, certifications, expérience, attitude, motivations
  • L’objet de la transmission : savoir-faire et/ou savoir-être
  • La proximité/distance avec le sujet : âge, genre, expérience partagée ou pas (école, formation, parcours, entreprise…)
  • Les données de l’échange : bénéfices et gratifications pour chaque partie (accompagnant et accompagné)
  • Le contexte de la transmission : programme structuré ou pas, objectif, durée, modalités de l’accompagnement
  • L’objectivité de l’évaluation : supports factuels, perception

 

1. Le profil de l’accompagnant : diplômes et certifications vs expérience et soft skills

Si tout le monde peut s’improviser coach ou formateur de manière déclarative, ces deux « rôles » sont également des métiers en tant que tels, encadrés par de nombreuses règles. Même si les certifications de coach ne sont pas forcément équivalentes en qualité et en notoriété, le développement du marché impose, de fait, un minimum de standardisation dans les pratiques et une exigence accrue de certifications. Un coach est donc généralement certifié en tant que tel. Côté formateurs, le diplôme n’est pas toujours le premier critère en matière de formation professionnelle et un indépendant pas tenu d’avoir une certification s’il est sous-traitant, mais l’exigence de la pratique et la concurrence du marché jouent le rôle de régulateurs.

A l’inverse, être mentor ou tuteur ne nécessite, a priori, aucun diplôme, et est rarement un métier à temps plein : l’expérience et l’attitude de l’accompagnant, ses « soft skills », sont plutôt les éléments dominants du profil à évaluer, sans l’aide de critères externes.

 

2. L’objet de la transmission : savoir-faire ou savoir-être ?

Sans verser dans une distinction caricaturale forcée, le formateur et le tuteur transmettent essentiellement des savoir-faire, quand le coach et le mentor transmettent essentiellement du savoir-être.

Le formateur intervient sur un contenu précis : il transmet expressément des techniques (même s’il ne fait pas forcément que ça). Le meilleur formateur est également celui qui transmet un savoir-être, mais la condition sine qua non de son intervention est la transmission de savoir-faire.

Le tuteur intervient dans la foulée du formateur : il aide à l’acquisition de ces mêmes techniques, même s’il a une approche différente du formateur. L’objet de son intervention est de faire en sorte que la technique – ou un contenu factuel – est assimilée.

Le coach ou le mentor, lui, intervient en complément de l’acquisition technique : l’objet de son accompagnement est de rendre la technique opérationnelle, opérante, dans un contexte d’évolution particulier, en s’appuyant sur des compétences relationnelles qui peuvent être tout à fait différentes et assez éloignées des compétences techniques.

 

3. La proximité/distance avec le sujet : vécu partagé, proximité relationnelle

Les programmes de tutorat ou de mentorat valorisent une certaine proximité entre accompagnant et accompagné, quand le formateur ou le coach n’a pas besoin d’avoir de proximité préalable (vécu en commun), et parfois n’instaure même pas de proximité relationnelle.

Le tuteur est souvent l’accompagnant le plus proche de l’accompagné : c’est généralement un ancien élève, ou élève plus avancé, qui accompagne un plus jeune. Ils ont clairement un vécu partagé précis, ce qui instaure directement une grande proximité relationnelle entre eux.

Le mentor se situe plus souvent dans le cadre professionnel : sans avoir exactement la même expérience, on attend de lui un minimum de vécu partagé comme « garantie » de la qualité de son accompagnement : s’il peut partager une expérience valable, c’est parce qu’il a vécu, avant le mentoré, une situation similaire. C’est d’ailleurs une condition explicite de nombreux programmes de mentorat : mentorat de femmes par d’autres femmes, d’entrepreneurs par d’autres entrepreneurs, de femmes entrepreneures par d’autres femmes entrepreneures, etc.

4. Les données de l’échange : bénéfices et gratifications pour chaque partie

Le coach et le formateur sont généralement rémunérés, quand les mentors et tuteurs sont très souvent bénévoles. Néanmoins, le développement des plateformes en ligne de contenus et de mise en relation dans de nombreux univers ces dernières années a fait émerger des modèles économiques où les mentors et/ou tuteurs peuvent être rémunérés, sans pour autant qu’ils deviennent des coachs ni des formateurs.

La rémunération financière ne peut donc être le seul critère de distinction entre un coach et un mentor, par exemple. Ce n’est pas non plus la seule « gratification » à opposer au pur bénévolat, car on peut envisager d’autres formes de gratifications, comme l’accès à conférences, à des formations, à du networking, pour les accompagnants.

Inversement, ce qui est attendu par l’accompagné, est généralement une obligation de résultats de la part du formateur, la même chose avec plus de tolérance de la part du coach (car il est accepté que l’accompagné doit faire sa part du travail), alors qu’on attend de la part du mentor ou du tuteur plutôt une obligation de moyens.

Cette attente est assez directement corrélée au modèle de gratification : quand on paie, on attend un résultat. Le développement actuel de nouvelles formes de transmission et d’apprentissage complexifie les attentes de part et d’autre, d’où l’intérêt de bien clarifier les données de l’échange pour chaque partie.

 

5. Le contexte de la transmission : programme structuré vs liberté d’animation

Le cadre de la formation est généralement le plus structuré, car il y a un programme précis à partager avec une logique d’évolution établie. Le coach se situe aussi normalement dans un cadre structuré, car c’est ce qu’on attend de lui : qu’il pose des balises claires, des objectifs intermédiaires, qu’il mette de la structure là où il n’y en a pas.

Le mentor et le tuteur ont une liberté d’accompagnement plus grande, qui s’exprime dans les modalités d’accompagnement : rendez-vous organisés de manière souvent plus libre, sujets abordés selon les besoins du moment, plus grande initiative de la part de l’accompagné dans le choix des sujets… Plus légère est la structure externe, plus la qualité de la relation et du résultat dépend de la contribution de chaque partie mais également de la perception de chacun, qui est très subjective.

Ce qui amène le dernier critère : l’objectivité de l’évaluation

 

6. L’objectivité de l’évaluation : supports factuels vs perception

L’avantage d’un programme structuré est qu’il oppose des éléments factuels à l’évaluation : elle ne dépend pas/plus uniquement de la perception de chacun. Les 2 parties peuvent constater ensemble ce qui a été concrètement fait, le comparer à d’autres réalisations, mesurer une distance à l’objectif…

La relation mentorale ou tutorale est très dépendante de la perception de chaque partie : si la compatibilité n’est pas bonne entre les 2 parties prenantes, la relation ne peut se développer. Or, moins il y a de structure précise, plus les éléments de compatibilité peuvent être intangibles et difficiles à définir en amont.

 

Comment appliquer ces critères ?

En synthèse, ces rôles se ressemblent mais ne se superposent pas : par contre, un formateur par exemple, peut tout à fait être formateur dans un cadre donné, mentor dans un autre, et coach dans encore un autre. D’où l’intérêt d’avoir clairement en tête la mission, le contexte, l’attendu, les données de l’échange…

C’est à la mise en place du programme, en amont, que ces questions doivent se poser, par rapport à l’objectif à atteindre pour les accompagnés : selon cet objectif, et les moyens et contraintes à prendre en compte, le bon profil d’accompagnant sera clairement identifié et de nombreux tâtonnement évités !

 

 

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