Bouygues Telecom et Adecco group ont communiqué récemment sur leur stratégie IA et la manière dont ils ont choisi d’augmenter les conseillers de clientèle (dans le cas de Bouygues) ou de remplacer les recruteurs sur certaines tâches préliminaires (dans le cas d’Adecco).
Quelle inspiration tirer de ces 2 approches ?
Même si elles ne sont pas dans le même secteur d’activité (et au-delà du fait qu’ils sont tous les deux en partie utilisateurs d’AgentForce de Salesforce) ?
Bouygues Telecom a choisi d’enrichir les moyens à disposition des conseillers grâce à l’IA :
- Accès à un résumé de l’historique du client, qui peut remonter jusqu’à 30 jours en incluant tous les contacts
- Accès à des options de recherches extensives sur la base de connaissance de l’entreprise
- C’est le conseiller (et non le client), qui interagit avec l’agent conversationnel IA, qui a une latence de réponse plus rapide que la recherche classique dans les outils de l’entreprise
- L’agent est également utilisé pour faire de la correction et du formatage automatique sur les récapitulatifs que les collaborateurs envoient aux clients par e-mail ou SMS
- KPI clé annoncé : amélioration de la satisfaction client
Adecco UK a choisi de screener les candidats avec un agent conversationnel :
Adecco Group a largement communiqué sur sa stratégie IA, je me suis intéressée à un aspect particulier qui est celui du recrutement et de la pré-sélection des candidats, développé au UK :
- Dans ce cas particulier, c’est l’agent IA qui interagit avec les candidats
- Les candidats échangent avec l’IA par email ou SMS, comme dans une conversation normale ; ils savent que c’est une IA qui leur répond
- L’objectif de cette conversation préliminaire est de qualifier les candidats pour savoir s’ils sont éligibles à un échange avec un conseiller humain
- KPI clé annoncé : libérer du temps des recruteurs pour qu’ils se concentrent davantage sur l’évaluation des compétences relationnelles des candidats et la conversation qui va suivre
- Point intéressant communiqué : 57% de ces échanges ont eu lieu hors des horaires habituels de travail ; la pré-qualification par l’IA aurait également permis de contacter des milliers de candidats en amont
Concernant Adecco, ma première réaction a été la méfiance ; dans le cas d’une recherche d’emploi, si importante pour ceux qui ont besoin d’un job, est-ce vraiment judicieux de laisser une IA sélectionner les candidats et les CV ?
Mais en y réfléchissant davantage, la vraie question me semble être : que faisaient vraiment les humains dans cette phase de présélection ? Appliquaient-ils un jugement critique à chaque CV, ou une grille mécanique d’évaluation d’une checklist de critères ?
Si effectivement le jugement critique s’appliquait à chaque CV, on peut s’inquiéter du remplacement par une IA. Mais si on était déjà à une échelle industrielle où l’humain se comportait d’une manière mécanique, alors l’IA ne peut qu’être plus efficace…
Que retenir de ces 2 approches ?
- La nécessité d’identifier spécifiquement, dans chaque workflow :
- où sont les poches de productivité
- et aussi où et comment se crée la valeur
- et l’un n’est PAS le miroir de l’autre !
- Le fait que la valeur ne se crée pas de la même manière dans toutes les entreprises, même si les workflows peuvent être similaires dans un même secteur d’activité. Elle est aussi dépendante de la mission de l’entreprise, de la manière dont elle est managée, de ses valeurs, de sa promesse de service…
Tout le monde s’accorde facilement sur le point 1, mais c’est le point 2 qui me paraît le plus inspirant :
au-delà du choix d’augmenter ou de remplacer, qui est déjà un vrai choix en soi, la manière dont on le fait et à quel endroit, peut effectivement contribuer à simplement augmenter la productivité… ou affirmer encore davantage un positionnement de marque ou d’entreprise.
Il est donc fondamental que la stratégie IA ne soit pas uniquement une logique IT ou d’opérations, ou même RH, sans lien avec la stratégie d’entreprise… car on a vite fait, sous prétexte de productivité, de moyenniser ou de lisser les moments de création de valeur, et donc, au final, de ne créer de différence que par la course à la productivité.